Pourquoi Nos Aquariums Impactent-Ils La Vie Des Océans ?
Choses à Savoir
Derrière la beauté colorée des aquariums se cache une réalité bien plus sombre : la majorité des poissons qui y nagent ne viennent pas d’élevages, mais directement de l’océan. Selon une étude récente publiée dans la revue Frontiers in Marine Science, près de 90 % des poissons d’aquarium vendus en ligne aux États-Unis — hors poissons d’eau douce — sont prélevés dans la nature, souvent dans les récifs coralliens tropicaux d’Asie du Sud-Est, d’Afrique ou des Caraïbes.
Ce commerce, estimé à plus d’un milliard de dollars par an, concerne environ 2 300 espèces marines. Certaines, comme le poisson-clown rendu célèbre par le film Le Monde de Nemo, ou les poissons-anges et les chirurgiens bleus, sont particulièrement prisées. Pour répondre à la demande, des pêcheurs locaux capturent les poissons à la main ou à l’aide de filets fins. Mais dans de nombreux cas, des méthodes destructrices sont encore utilisées : notamment l’emploi de cyanure, une substance chimique qui étourdit temporairement les poissons, facilitant leur capture — au prix de dégâts considérables sur les coraux et sur les autres organismes marins.
Le problème ne se limite pas à la pêche illégale. Même lorsqu’elle est autorisée, le prélèvement massif de poissons d’ornement déstabilise les écosystèmes coralliens, déjà fragilisés par le réchauffement climatique. En retirant certaines espèces clés — comme les poissons-papillons ou les labres nettoyeurs —, on perturbe la chaîne alimentaire et l’équilibre biologique des récifs. Ces petits poissons jouent un rôle crucial dans la régulation des algues et la santé des coraux.
Autre constat alarmant : l’opacité du commerce mondial. L’étude souligne qu’à peine 25 % des exportations de poissons marins sont correctement documentées. Cela signifie que des millions d’animaux sont transportés chaque année sans traçabilité claire, souvent dans des conditions stressantes et mortelles : jusqu’à 80 % meurent avant même d’arriver dans les aquariums des particuliers.
Face à ce constat, certains pays comme Hawaï ou les Philippines ont restreint, voire interdit, la capture de poissons d’ornement sauvages. Des initiatives émergent aussi pour encourager l’aquaculture durable : des fermes marines qui élèvent certaines espèces sans appauvrir les océans. Mais ces efforts restent marginaux.
L’étude conclut sur une évidence : derrière chaque aquarium scintillant se cache souvent un morceau d’océan arraché à son milieu naturel. Tant que les consommateurs ignoreront l’origine de leurs poissons, ce commerce continuera à vider les récifs — lentement, mais sûrement.
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